La laïcité, c'est un principe qui vous garantit la liberté de croire ou de ne pas croire. Historiquement, la laïcité découle de la séparation entre la religion et l’État qui doit se montrer neutre vis-à-vis des croyances de chacun. C'est à dire que dans un pays laïc, l'Église ne peut pas intervenir dans les décisions de l'État, et l'État ne peut pas intervenir dans la vie religieuse.
Andrea Gringeri - RTS Découverte Publié le 19 octobre 2017
Il faut savoir que la séparation entre Église et État n’a pas toujours été un acquis sur le continent européen: dans la Rome antique, l’empereur avait un statut divin. Au Moyen Âge, les rois étaient souvent considérés comme des représentants de Dieu sur terre. Les monarques de droit divin justifiaient leur pouvoir comme une fonction donnée par Dieu. En France, la laïcité a commencé à prendre forme pendant la Révolution française et l’abolition de l’Ancien régime (accompagnée de la fin des privilèges ecclésiastiques notamment).
L’historien et sociologue français Jean Baubérot identifie quatre concepts centraux de la laïcité. Les deux premiers sont individuels: la liberté de conscience et l’égalité entre les citoyens indépendamment de leurs convictions. Deux sont collectifs: la séparation de l’Église et de l’État et la neutralité de l’État à l’égard de toute conviction. Ils doivent permettre d’éviter d’afficher une préférence en faveur d’une partie de la population au détriment d’une autre.
La laïcité n’interdit cependant pas d’avoir des convictions! Vous avez parfaitement le droit d’être croyant, athée ou agnostique dans une société laïque. Mais alors, ça sert à quoi cette laïcité? C’est un principe qui veut favoriser le vivre-ensemble. Dans une société où les gens ont des croyances différentes, la laïcité doit nous permettre de tous cohabiter sans imposer nos croyances et modes de vie aux autres. Chez soi, chacun fait comme il veut. Mais dans l’espace public, des règles communes s’appliquent.
Deux conceptions de la laïcité sont souvent en débat: une vision “procédurale” et une vision “programmatique”. Dans sa version procédurale, la laïcité vise à favoriser le vivre ensemble en permettant aux citoyens d’exprimer leurs attachements et leurs convictions de la manière la plus ample possible au sein de l’espace public (dans les limites du droit). La conception programmatique vise à privatiser la religion, afin de briser son influence collective. Il s’agit d’une vision athée militante de la laïcité.
Même si la plupart des pays occidentaux sont attachés à l’idée d’un État laïc, tous ne l’appliquent pas de la même manière. Pour mieux comprendre ce concept, il est intéressant de revenir sur quelques controverses récentes qui l’ont mis au-devant de la scène: Quelques cas où la laïcité a fait débat en Suisse
Un équilibre délicat à trouver
Quand une polémique autour de questions religieuses éclate, existe-t-il une solution parfaite qui contente tout le monde ? Probablement pas ! Il s’agit toujours d’un arbitrage, un compromis entre différentes valeurs et différents droits qui peuvent entrer en confrontation. Une pesée d’intérêts est nécessaire pour trouver le bon équilibre entre le respect des diverses croyances et le meilleur vivre-ensemble.
Liberté, égalité, neutralité
Dans l’espace privé, chacun vit sa religion comme il l’entend (tant qu’il respecte les lois bien entendu). Davantage que les citoyens dont la liberté de conscience et croyance est protégée, c’est donc l’État essentiellement qui a un impératif de laïcité. Il se doit en effet d’être neutre s’il veut prétendre représenter tout le monde.
Dans les situations qui vont suivre, la laïcité est surtout monopolisée dans un cas: l’école. C’est en effet un lieu particulier et sensible qui doit permettre aux élèves le développement de leur esprit critique. L’État est donc particulièrement attentif au fait de respecter à la fois la neutralité religieuse de l’institution et la liberté de conscience des étudiants.
Tous égaux devant la laïcité ?
De nombreux cas examinés plus bas concernent l’islam. Particulièrement depuis les attentats du 11 septembre (sans parler des récentes attaques terroristes en Europe), la peur suscitée par cette religion a amené une certaine crispation entre des revendications qui peuvent parfois être intégristes et une instrumentalisation politique démagogue de l’islamophobie.
Pour éviter ces écueils, la philosophe française Cécile Laborde propose une petite expérience de pensée intéressante: quand il s’agit de laïcité et d’islam, il peut être utile de se demander quelle serait notre réaction si la revendication (politique, scolaire, vestimentaire, etc.) venait d’une religieuse intégriste italienne. Prendrions-nous intuitivement la même décision?